Teresa Cremisi:

Publié le par Nora Dardir

« C’est le livre de qualité qui survivra »

Ex-bras droit d'Antoine Gallimard, elle a démissionné il y a un an et demi pour diriger la maison concurrente, Flammarion. Teresa Cremisi, 60 ans, revient sur son expérience.      

 

1- Teresa Cremisi, en quoi la multiplicité de vos origines a-t-elle marqué votre parcours professionnel et vos choix ?

     Je suis née en Alexandrie d’un père italien et d’une mère espagnole anglaise, tous les deux très cultivés et francophiles. Et, j’ai un souvenir très agréable de mon enfance en Egypte. Ensuite, j’ai vécu en Italie pendant 25 ans, et là il fallait un grand effort d’adaptation, car je parlais assez mal l’italien, à la maison on parlait français et anglais. Tout ce mélange m’a vraiment donné le goût et des mondes différents et de personnes différentes. Personnellement, cela donné l’envie d’acquérir les idées des autres.   

 2-     Vous avez été directrice éditoriale chez « Gallimard » pendant seize ans. Quel bilan tirez-vous de cette expérience?  

   Gallimard m’a donnée énormément, certes c’était mon rêve, c’était une grande maison de littérature possédant le plus beau catalogue du monde. Cela m’a donné la possibilité de travailler dans des collections extraordinaires, et dans un milieu extraordinaire pour qui aime la littérature. J’y ai aussi puisé le savoir-faire d’une grande institution. D’un autre côté, à mon arrivée à   Gallimard quand je pense avoir apporté un esprit de jeunesse et de simplicité   parce que c’était une maison très institutionnelle. Et j’ai un peu bousculé,  pour que  gens se parlent entre eux, et pour qu’il y ait plus de nouveauté, plus de dynamisme.

3-     Il y a un an et demi que vous avez démissionné pour prendre la tête des éditions Flammarion, après avoir refusé de nombreuses propositions. Pourquoi ce choix? 

   Certes, partir est toujours difficile mais il y a un moment dans notre vie où nous pouvons accepter ce que nous avons déjà refusé. Des moments où nous nous  sentons obligés de changer. Aujourd’hui mes enfants ont grandi, j’ai pensé tenter autre chose, ajouter un nouvel élan à ma vie. Quant on construit, on peut quelque part on peut construire ailleurs. Et puis nous devons toujours changer les choses pour les rendre plus efficaces, et c’est justement ce que j’ai essayé de faire avec Flammarion : Redonner de l’éclat à cette ancienne maison pour la rendre  plus dynamique.  

4-     Quelles différences principales voyez-vous entre Gallimard et Flammarion? 

    Flammarion est une maison plus ancienne, cinquante ans de plus environ. Elle est structurée de manière différente aussi. Elle est divisée en plusieurs petites maisons au sein du groupe, et accorde une place plus grande à  la non- fiction, c’est-à-dire l’histoire, l’économie, le droit, et les sciences, beaucoup de sciences. Chez Gallimard en revanche, la littérature occupe presque toute la place. En fait, il s’agit de deux mondes tout à fait différents. Ce n’est même pas comparable.

5-      Avec l’expérience qui est la vôtre, avez-vous réussi à percer le secret de la réussite d’un auteur ? 

    Prenons comme exemple l’énorme succès réalisé par Alaa El-Aswany en Egypte, puis en France et en Italie, tandis que tant d’auteurs ne sont même pas lus. Cela dépend de l’écrivain et un peu du hasard, mais surtout de sa capacité a trouver de l’écho auprès des lecteurs au travers de ce qu’il écrit.

6-    Quel est le rôle de l’éditeur dans ce succès?  

   Certes, le choix de la bonne maison d’édition est important. L’éditeur est un pivot pour l’écrivain, mais il ne peut pas tout faire. Et je pense qu’en définitive c’est le livre de qualité qui survivra.

7-     L’écriture ne vous a-t-elle jamais tentée ?  

   Ecrire, non, ça ne m’a jamais tenté, bien que j’en sois certainement capable. Je traduis, je commente, mais j’ai choisi de me concentrer sur l’édition. En un sens, les maisons d’éditions sont des centres de création littéraire. La vie des éditeurs est un salon perpétuel entre culture et marché.  

                                  Propos recueillis par Nora Dardir

Publié dans J’ai interviewé

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M
j'ai aimé le titre.Ce sont les produits de quelité qui vont survivre à la maondialisation y compris les produits culturels.Bravo
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N
<br /> Merci Mohamed pour ton commentaire. J’ai fait cette interview pour la gazette de la foire du livre « Les Echos du pavillon », tu peux la trouver sur internent mais il y manque le numéro 5, où mon interview a été publiée. <br /> NB : Les Echos du Pavillon :  www.ambafrance-eg.org/cfcc/IMG/pdf/EchosduPavillon-Entier.pdf<br />